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L'esprit du changement - Eric Albert - lesechos.fr

Lorsque l'on applique à la lettre le changement, on ne met en place les actions recommandées que pour « cocher la case ».

Quelle est l'entreprise qui n'est pas dans un processus de changement ? Heureusement, elles le sont presque toutes. Mais, la question est de savoir combien changent réellement. Aucun doute que toutes mettent en place de vraies évolutions. Mais celles-ci sont souvent très en deçà des attentes et des besoins d'adaptation à un environnement qui lui, bouge avec une ampleur et une rapidité inédite.  

Le changement organisationnel ne suffit pas

Ce qui est le plus facile à faire changer, c'est l'organisation. Il est donc logique de commencer par là. Une nouvelle organisation est un cadre qui vise à faciliter les interactions entre les acteurs et à améliorer l'efficacité du collectif. Tout est donc dans son usage. Un modèle matriciel, qui permet de casser les silos et de mettre en commun des ressources, peut vite devenir une usine à gaz et une machine à produire des conflits. Ou perdre sa finalité, chacun se recréant son territoire tout en respectant les apparences du matriciel. C'est pourquoi le changement organisationnel ne suffit pas.

Bien souvent, les entreprises y ajoutent une dimension comportementale. A l'organisation matricielle est associée l'injonction de collaborer. Chacun est invité à se fixer des objectifs sur ce plan. Disciplinés, les acteurs jouent le jeu et pour mieux collaborer, ils décident, par exemple, de se rencontrer plus souvent. C'est certes un bon début mais qui ne garantit en rien la qualité des échanges, la prise en compte des contraintes de l'autre et la capacité à gérer les désaccords. Autrement dit, bien souvent lorsqu'il s'agit de comportement, les acteurs se donnent des objectifs de plans d'action organisationnels. Ce faisant, ils appliquent à la lettre ce qu'on leur demande. Mais ils ne sont pas dans l'état d'esprit à l'origine du changement : la prise de conscience qu'il faut plus de collaboration entre entités et acteurs. Car lorsqu'on applique à la lettre le changement, on ne met en place les actions recommandées que pour « cocher la case ».  

D'autres sources de satisfaction

S'approprier l'esprit du changement est plus compliqué. Cela suppose de s'interroger sur soi-même et de remettre en cause sa façon de fonctionner, ses attitudes, son mode de relation aux autres. Bien souvent, cela touche aussi à ce qui donne des petites satisfactions… Par exemple, voir son entité mieux performer que les autres. Mais cette source de fierté, n'a plus lieu d'être dans l'esprit du nouveau modèle. Il faudra donc trouver d'autres sources de plaisir dans la collaboration.

Faire s'approprier cette nouvelle mentalité est autrement plus difficile que d'appliquer à la lettre un plan d'action du changement. Cela touche à l'intime de chacun. C'est pourtant la condition pour que les changements se mettent vraiment en place. Cela suppose que les dirigeants, les premiers, en soient convaincus pour eux-mêmes. Puis qu'ils transmettent aux équipes un élan et une méthode pour les aider à progresser : un sacré challenge managérial.