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Développer la gratuité managériale - Eric Albert - lesechos.fr

Comme les politiques, les dirigeants surpondèrent l'intérêt particulier à court terme, car c'est à la source de leur évaluation.

La COP 28 est mieux partie que prévu. Pour autant, on y retrouve une fois de plus le ballet des confrontations des intérêts de chaque état. Chacun vient défendre une représentation du sujet qui n'est sous-tendue que par ses besoins propres comme, par exemple l'usage du charbon.

Autrement dit, les intérêts particuliers à court terme guident chacun des acteurs qui négocient pour obtenir un peu plus ou bloquer ce qui les dérange.

Il en est de même dans l'entreprise. Chacun des patrons de branche ou de filiale a tendance à ne voir que ce qui profite à son périmètre et tente de le faire valoir pour se gagner quelques marges de manoeuvre.

La grande différence est qu'il y a, au-dessus, un boss garant de l'intérêt général. Sa propre évaluation se fait sur l'optimisation du fonctionnement de l'ensemble. Il pose un cadre et assure lui-même les arbitrages qui garantissent au mieux la dynamique de l'ensemble. Ce qui suppose un savant dosage entre, d'un côté, un souci d'efficacité et, de l'autre, celui d'équité.

Chacun, à un moment, devra accepter des concessions qui seront d'autant plus mal vécues par ses propres équipes qu'elles vont à l'encontre des paramètres qui leur permet d'atteindre leurs objectifs.

Un indispensable don des acteurs à la collectivité

Comme les politiques, les dirigeants surpondèrent l'intérêt particulier à court terme, car c'est à la source de leur évaluation. La performance chiffrée de l'année de leur entité reste la mesure de base sur laquelle repose leur rémunération variable. Du reste, il est plus compliqué de prendre en compte ce qu'ils font pour le moyen terme, sans effet immédiat mais important pour l'entreprise dans le futur. Plus encore, leur contribution à l'intérêt général – parfois aux dépens de leurs intérêts particuliers – est difficile à prendre en considération.

Peut être faudrait-il introduire la notion de gratuité des actions au service de l'intérêt général ? Passer du temps à former un collègue, se consacrer à atténuer les tensions relationnelles, contribuer à un groupe de travail prospectif, représenter l'entreprise face à des associations hostiles... Tout cela est très utile mais peu, ou pas, valorisé. Ceux qui le font offrent leur temps et leur énergie sans en attendre un retour. Or les organisations ne peuvent pas fonctionner sans ce don des acteurs à la collectivité.

Il faut veiller à ne pas pousser les acteurs à tendre vers leur égoïsme naturel. Et, pour cela, introduire l'esprit de gratuité et de don. Les dirigeants doivent incarner une exemplarité dans ce domaine ; ce qui contribue à donner du sens à la génération montante.