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Management : un recadrage collectif s'avère souvent contre-productif - Eric Albert - lesechos.fr

L'entreprise a beaucoup à apprendre à l'Etat dans le domaine de la conduite du changement et de la gestion des collectifs.

« Les chapelles, le narcissisme des petites différences, sont inutiles et funestes s'agissant des membres du gouvernement », aurait dit le président de la République, Emmanuel Macron, lors d'un Conseil des ministres. Bien sûr, chacun trouvant dans le camp opposé des attitudes qui seraient dénoncées par le président, les interprétations sur qui il visait vont bon train. Il reste que ce recadrage collectif est une double erreur de management.

D'abord, en demandant à des politiques de renoncer à se démarquer les uns des autres tant par les chapelles que par les différences. C'est comme si on demandait à des sportifs de ne pas avoir l'esprit de compétition. Par essence, le politique a besoin de trouver une singularité qui le fait sortir du lot. Ensuite, en faisant un reproche collectif qui, en vérité, ne vise que certains. Car, dans ce cas, non seulement la cible n'est pas touchée – elle se réfugie, le plus souvent, dans une attitude défensive et reporte sur les autres ce qui pourrait la concerner – mais en plus, le collectif est démotivé. Le mécontentement global touche en effet certains qui n'ont probablement pas démérité, et même se sont particulièrement dédiés à leur tâche.

À froid, en appui sur des faits

Le président d'un pays, d'une collectivité ou d'un parti politique – comme un patron ou un manager – a aussi la tâche de gérer une équipe dirigeante et devrait s'approprier quelques principes managériaux de base. Par exemple, il est utile, au moment de la constitution d'une équipe, de la conduire à se fixer elle-même des règles pour garantir que chacun contribuera davantage au projet commun qu'à ses intérêts personnels, ou à ceux de l'entité qu'il représente. Ensuite, dans le suivi de la mise en oeuvre de ces règles, des recadrages individuels sont souvent indispensables. En revanche, en collectif, le dirigeant doit passer des messages positifs qui donnent de l'élan, surtout qui l'entretient et le régénère dans les périodes de creux.

Important : un recadrage ne doit jamais se faire sous l'emprise de la mauvaise humeur ou de l'irritation. Le dirigeant est alors maladroit, inefficace et souvent toxique. En revanche, il faut le faire à froid en s'appuyant sur des faits et en demandant un changement explicite à l'intéressé(e). En cette période de campagne électorale, les candidats, si prompts à faire la leçon aux entrepreneurs, pourraient s'en inspirer. Car une part de leur responsabilité sera managériale et de conduire le changement. L'entreprise a beaucoup à apprendre à l'Etat dans ce domaine.