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Pourquoi les dirigeants pratiquent peu la concertation - Eric Albert - lesechos.fr

Sur le principe, tout le monde est pour et en comprend les avantages. Sur le terrain, se concerter est tout autre chose.

Avec les grèves dans les raffineries, d'un côté, et le feuilleton de la réforme des retraites de l'autre, la concertation semble bien difficile.

Dans les raffineries, TotalEnergies est confronté à une grève préventive qui précède une négociation salariale dont la date a été fixée avec les partenaires sociaux. Les perturbations engendrées et la pression du gouvernement ont poussé la direction du groupe a annoncer unilatéralement, dans la nuit du 13 au 14 octobre, ses dernières propositions : 7% d'augmentation de salaire et des primes pouvant aller de 3 000 à 6 000 euros pour l'année 2022. La CGT, qui avait déclaré qu'une annonce n'est pas une négociation, avait quitté la table des négociations peu avant. Séquence redoutable d'un blocage qui provoque le dévoilement de propositions acceptées par certains et considérées, par d'autres, comme un refus de négocier.

Sur la retraite, le gouvernement propose une concertation jusqu'à la fin de l'année, tout en annonçant une mise en application de la réforme pour l'été. En somme, avant d'avoir commencé, on parle d'une mise en oeuvre comme si c'était déjà décidé.

Champs ouverts

D'un coté des acteurs qui jouent un pur rapport de force, de l'autre d'autres acteurs dont la conviction est déjà faite et n'attend rien de l'échange. Or sur le principe, tout le monde est pour la concertation et en comprend les avantages.

Se concerter permet de susciter l'adhésion des acteurs en les faisant participer aux discussions en amont des décisions. En pratique, l'une des parties peut la faire échouer tout en déclarant qu'il la souhaite. Si la concertation est indispensable encore faut-il l'utiliser à bon escient.

Une première étape essentielle est de partager un constat commun et la nécessité de changer. On ne prend souvent pas assez de temps sur ce point de départ indispensable en faisant l'hypothèse que les autres pensent comme soi.

Il faut ensuite cadrer sur quoi porte la concertation. Ce qui bien sûr signifie que des champs sont ouverts. Plus les acteurs sont déjà convaincus moins ils sont ouverts à d'autres suggestions.

Du temps et de l'écoute

La posture, pour entrer en concertation, est de prendre du temps et d'écouter. On comprend mieux pourquoi les dirigeants la pratiquent peu, c'est exactement ce qu'ils ont le plus de mal à faire.

Enfin il faut montrer en quoi la concertation a été utile et a enrichi les solutions trouvées.

La concertation suppose d'être de bonne foi, de faire preuve d'une certaine modestie et d'attendre des solutions de l'intelligence collective. Elle nécessite que l'on accepte de changer d'avis. Ce devrait être l'un des critères de sélection des dirigeants de demain.