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L'ego et la mission - Eric Albert - lesechos.fr

Il faut repérer les indicateurs d'un ego surpondéré très tôt. Pour ne pas mettre sur la voie royale ceux qui les présentent. Car, une fois en place, leur capacité de nuisance est considérable.

Rêves de toute puissance à travers une OPA hasardeuse, prolongation sans fin de mandats de dirigeant, mode de gouvernance solitaire qui limite la contestation, les exemples ne manquent pas du débordement des ego de nos dirigeants. Et l'actualité en est riche. Certes chacun se réfugie derrière l'intérêt de son entreprise pour justifier ce qu'il fait et raconte une belle histoire forgée avec talent. Suffisamment belle pour continuer à tromper leur monde et se maintenir au pouvoir en continuant à agir avant tout pour eux-mêmes. C'est particulièrement vrai en fin de carrière, où pour se maintenir, les dirigeants peuvent se montrer prêts à toutes les manoeuvres. Les dirigeants s'assimilent parfois tellement à leur entreprise qu'ils pensent sincèrement que ce qui est bon pour eux l'est pour l'entreprise : l'ego rend aveugle.

Dangereux

On pourrait considérer qu'il ne s'agit que de la comédie humaine universelle qui existe depuis toujours. Probablement. Ce n'est pas pour autant qu'il ne faut pas mettre tous les moyens pour lutter contre ce phénomène. Car, si c'est lorsqu'ils ont tous les pouvoirs que c'est le plus dangereux, la taille de l'ego est présente tout au long de leur carrière. Mais, tant qu'il s'agit de gravir les marches, les acteurs sont souvent suffisamment habiles pour le dissimuler, du moins en partie.

C'est pourquoi, il faut tout au long du parcours du dirigeant détecter les signes qui indiquent un ego surpondéré. Parmi ceux-ci, l'appropriation des succès est souvent présent. Dès que quelque chose réussit, c'est grâce à lui. Pour la forme, il peut citer les équipes mais lorsqu'on le pousse dans ses retranchements, il est souvent convaincu que c'est grâce à lui. De même, il se remet peu en cause lors des échecs, qu'il ne considère pas comme étant de son fait.

En général, il se met facilement en rivalité avec ses pairs, car il a besoin de se comparer pour se rassurer. C'est souvent quelqu'un qui aime le pouvoir et le territoire, il aime avoir tous les leviers pour décider sur tout et particulièrement sur les individus. Et il se montre attaché aux signes extérieurs de pouvoir. Il faut que l'on sache qu'il en a. Enfin, il gère sa carrière non pour l'intérêt global de l'entreprise, mais pour le sien propre. Ainsi prendre un job qui rend service, mais qui n'est pas un piédestal, ne correspond pas à sa logique.

Ces indicateurs ne sont pas toujours tous présents, et pas non plus exhaustifs de l'inflation de l'ego. Il faut les repérer très tôt. Pour ne pas mettre sur la voie royale ceux qui les présentent. Car une fois en place leur capacité de nuisance est considérable.

Tous les acteurs ont un ego. Il faut juste vérifier qu'il n'est pas trop pesant, au point d'être, plus que la mission, le moteur principal.