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ChatGPT : pourquoi interdire au lieu de s'adapter ? - Eric Albert - lesechos.fr

En milieu professionnel, l'intelligence artificielle n'a pas fini de nous bousculer. Tant mieux ! Cela stimule notre agilité.

La prestigieuse école Sciences Po a annoncé qu'elle interdisait à ses étudiants l'usage de ChatGPT, sous peine d'être définitivement exclus.

Ce faisant, l'école demande à ses élèves de ne pas utiliser un nouvel outil qui sera omniprésent dans leur vie professionnelle à venir. Pis, elle ne s'interroge pas sur l'essentiel : que faut-il enseigner à de futurs professionnels qui auront à leur disposition Chat GPT ?

Sciences Po choisit la facilité de l'interdiction, qui lui économise une profonde remise en cause de son enseignement. Gageons qu'un certain nombre de professeurs ne sont pas prêts à le faire ! L'école ne prépare pas ses élèves au futur, elle les cantonne dans les patterns du passé.

Nouveauté dérangeante

Cette tendance peut se retrouver en entreprise. Plutôt que d'anticiper et d'utiliser les nouveautés, on s'accroche à ce que l'on sait faire en essayant le plus possible de le pérenniser.

La nouveauté est, du reste, souvent dérangeante. Elle oblige non seulement à se remettre en question mais, aussi, nécessite un nouvel apprentissage.

Il est probable qu'avec l'intelligence artificielle (IA), la plupart des métiers soient affectés, et que ceux qui les exercent doivent davantage apporter la preuve de leur valeur ajoutée. Dès lors, il y a une responsabilité managériale à préparer les équipes à cette mutation.

Il ne s'agit pas de les inquiéter, quoiqu'un peu d'inquiétude puisse être motrice. Chaque équipe doit apprendre à se projeter dans l'hypothèse qu'une partie des tâches qu'elle réalise aujourd'hui seront mieux accomplies par l'IA. À quelles difficultés s'attendre ? Comment améliorer leur valeur ajoutée ? Quels services supplémentaires offrir ?

Plus ces questions seront anticipées, dédramatisées et réfléchies collectivement, plus les acteurs les aborderont sereinement lorsqu'ils y seront confrontés. Il en va de la responsabilité de l'entreprise de garantir l'employabilité de ses équipes. L'organisation va s'appuyer sur des compétences nouvelles, et un certain nombre d'entre elles pourront se développer en interne.

Cette question de l'agilité relève d'un état d'esprit général, qui doit se diffuser dans toute l'entreprise. Face au système qu'ils maîtrisent, le comportement des managers doit différer de celui des profs de Sciences Po.

Se préserver, c'est imposer des risques à l'entreprise et aux équipes. Il faut, au contraire, alerter les collaborateurs, les encourager, les inciter à réfléchir et à proposer des changements, donc les responsabiliser sur les évolutions à venir. Sans quoi, les équipes se victimiseront et adopteront une attitude de résistance passive.

L'IA n'a pas fini de nous bousculer. Tant mieux ! Cela stimule notre agilité.