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Changer implique labeur, répétition et lassitude - Eric Albert - lesechos.fr

La responsabilité des dirigeants, pour mener le changement est de plus en plus d'être capables de résister à ce besoin des équipes d'être préservées de la lassitude. Et de renvoyer leurs troupes à cette nécessité, qui incombe à chacun, de travailler sur soi afin que les changements deviennent effectifs.

Notre monde est fait de stimulations. Elles viennent d'abord de notre cerveau de substitution, c'est-à-dire de notre smartphone. Toujours à portée de main, il nous informe, nous relie, nous conduit, nous encadre, nous distrait, nous approvisionne, nous forme, etc. Comme si cela ne suffisait pas, tout notre environnement est conçu pour nous solliciter ; de la montre à la voiture en passant par le réfrigérateur, les objets se mettent à parler.

Tout est fait pour ne pas lasser

Cette nouvelle donne n'est pas sans conséquence dans l'entreprise. Les collaborateurs ont pris l'habitude d'être stimulés par des facteurs externes – certains pourraient même avoir tendance à développer une certaine intolérance aux contextes dénués de stimuli.

L'aspect positif de la situation est l'importance accordée à la forme et à la communication. Pour tout nouveau projet, on cherche à provoquer « l'effet waouh ». Tout est fait pour ne pas lasser. La tendance se combine au nécessaire changement que les entreprises mettent en place. Le risque serait toutefois de confondre les deux. D'un côté, la stimulation vise à éviter de lasser, de l'autre, le changement veut adapter l'entreprise. Les deux démarches ont en commun le mouvement. Mais la stimulation relève davantage de l'agitation sans but, quand le véritable changement suppose persévérance et continuité. La première est l'écume qui reste en superficie, le second laboure en profondeur. Et mettre en oeuvre le changement se fait rarement sans labeur et répétition.

Travail sur soi

La confusion des deux notions est à l'origine de nombreux échecs dans les nécessaires évolutions culturelles que tentent de mettre en place les entreprises. Après en avoir parlé, mis en place quelques initiatives, des voix s'élèvent pour dire que « ça y est, on a compris... », sous-entendu : « On peut passer à autre chose ». D'ailleurs, les actions internes sont soumises à des baromètres pour savoir ce que les salariés en pensent… Ces derniers ont peut-être compris ; de là à changer, c'est une autre affaire. Pourtant, leur management considère qu'il faut passer à autre chose s'ils expriment être lassés d'un sujet.

La responsabilité des dirigeants, pour mener le changement, est donc de plus en plus d'être capables de résister à ce besoin des équipes d'être préservées de la lassitude. Pour garder leur ligne directrice, les dirigeants doivent renvoyer leurs troupes à cette nécessité, qui incombe à chacun, de travailler sur soi afin que les changements deviennent effectifs. Certes, ce peut être un peu lassant de revenir sans cesse sur les mêmes sujets. Il n'y a pourtant qu'ainsi que les vraies évolutions se font.