expand

La fin du management ? - Eric Albert - Les Echos

L'usage est de vous proposer un sujet de réflexion pour l'été dont certains disent qu'il est propice à cette activité. Donc, entre les apéritifs conviviaux et les matins courbaturés des excès sportifs de la veille, ma suggestion est de vous pencher sur la question de l'évolution du management.

L'usage est de vous proposer un sujet de réflexion pour l'été dont certains disent qu'il est propice à cette activité. Donc, entre les apéritifs conviviaux et les matins courbaturés des excès sportifs de la veille, ma suggestion est de vous pencher sur la question de l'évolution du management.

Comme il est peu vraisemblable que vous le fassiez, je suggère d'avoir la question en tête pour un usage lors des contretemps. Ainsi, plutôt que de s'énerver lors des embouteillages, queues et autres attentes de toutes sortes, ayez en tête que vous avez un sujet sur lequel porter votre attention.  Posons la problématique. L'environnement de l'entreprise est résumé par l'acronyme anglo-saxon Vuca (volatilité, incertitude ou uncertainty, complexité, ambiguïté).  La conséquence est de donner un sentiment de chaos. Tout est bouleversé, remis en cause. Ce qui était pertinent un jour ne l'est plus le lendemain. Le risque de perte de sens, d'impression de stop-and-go, induit découragement et épuisement.  De plus, cela conduit à surpondérer l'immédiateté plutôt que l'inscription dans le temps. L'enjeu majeur devient l'adaptabilité. Mais cette hyperadaptabilité, si elle ne s'appuie pas sur une identité forte, finit par provoquer déstabilisation et perte de repères. En interne, la tendance est à réduire le nombre de niveaux hiérarchiques pour avoir des organisations plates et à organiser le travail par projets. Chaque collaborateur est poussé à prendre des initiatives, à travailler en équipe projet, à construire son propre parcours en se développant. La performance est de plus en plus collective.  C'est dans la capacité des acteurs à collaborer et à s'organiser ensemble que se joue la réussite. Dans ce contexte, à quoi sert le manager ? Fixer des objectifs annuels et contrôler les résultats ? Faire du reporting ? Former des acteurs qui sont parfois plus compétents techniquement que lui ? Probablement rien de tout cela. Alors, est-ce la fin du management ?

Plus que jamais, l'entreprise a besoin de dirigeants qui garantissent la cohérence interne et la pérennité. Si la tendance à une plus grande autonomie interne va s'amplifier, elle est assortie d'une nécessité encore plus grande de mettre du sens, d'aligner les contributions et de ne pas se laisser ballotter au gré des secousses de l'immédiateté et des événements. L'entreprise de demain devra prendre en compte ses salariés dans leur diversité d'aspiration, assumer une responsabilité sociétale aux contours de plus en plus larges, tout en se développant dans un environnement où de nouveaux concurrents émergent et où les usages de ses clients évoluent très vite.

Et après ?

L'équation est de plus en plus complexe. Pour y faire face, les dirigeants auront besoin, plus que jamais, de travailler en équipe. Mais c'est le travail sur eux-mêmes qui leur permettra de faire face au vaste registre des situations auxquelles ils seront confrontés. Prise de recul, compréhension de leurs propres mécanismes émotionnels et de ceux des autres, ouverture sur leur environnement, capacité à prendre des risques, impact, la liste est non exhaustive. Bref, il y a du travail sur soi… ça tombe bien, les vacances arrivent.

Parue dans les Echos le 10/07/17